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C’est un ouvrage singulier mêlant récit historique, essai littéraire et réflexion sociale. L'auteur y explore les univers de la Légion étrangère française et de la Légion étrangère espagnole, offrant une perspective nuancée et humaine sur ces institutions souvent mythifiées.​

Une approche littéraire de l'aventure militaire

Mac Orlan, écrivain fasciné par l'aventure et le "fantastique social", s'intéresse aux motivations profondes qui poussent des hommes à rejoindre la Légion. Il souligne que l'engagement dans ces corps d'élite n'est pas uniquement dicté par des nécessités matérielles ou des passés troubles, mais aussi par une quête de sens, de poésie et d'héroïsme. Il écrit :

« On va à la Légion pour des causes qui appartiennent à la renommée farouche de l’aventure et parce que l’attrait d’une poésie [...] est plus puissant que l’intérêt estimé selon les lois de la vie civile » .​

Un panorama des théâtres d'opérations

L'ouvrage propose un tour d'horizon des principaux engagements de la Légion étrangère, depuis les campagnes coloniales en Afrique (Dahomey, Soudan, Madagascar) jusqu'aux conflits du XXe siècle, notamment la Première Guerre mondiale, le Maroc et la Syrie. Mac Orlan y décrit les conditions de vie des légionnaires, leur discipline rigoureuse, mais aussi leur camaraderie et leur résilience face à l'adversité.

Une réflexion sur la condition du légionnaire

Au-delà des récits de batailles, Mac Orlan s'interroge sur la place du légionnaire dans la société. Il cherche à déconstruire les stéréotypes associés à ces soldats souvent perçus comme des marginaux ou des desperados. Pour lui, le légionnaire est avant tout un homme en quête de rédemption, d'identité et d'appartenance, trouvant dans la Légion une forme de famille et de raison d'être.​

Une œuvre illustrée et documentée

L'édition originale de Légionnaires est enrichie de seize hors-texte en héliogravure, offrant des illustrations qui complètent le texte et plongent le lecteur dans l'univers visuel de la Légion. Ces images renforcent l'immersion dans le quotidien des légionnaires et les différents théâtres d'opérations évoqués.

legionnaire

En somme, Légionnaires est une œuvre majeure qui offre une vision profonde et humaniste de la Légion étrangère, loin des clichés, et qui témoigne de l'intérêt de Pierre Mac Orlan pour les figures de l'aventure et de la marginalité.

Qui était Pierre Mac Orlan ?

Pierre Mac Orlan (pseudonyme de Pierre Dumarchey), est un écrivain, journaliste et parolier français né le 26 février 1882 à Péronne (Somme) et mort le 27 juin 1970 à Saint-Cyr-sur-Morin (Seine-et-Marne).

PierreOrlon

Une vie marquée par l'aventure et la littérature

Fils de notaire, Pierre Dumarchey mène une jeunesse vagabonde, alternant petits boulots, voyages et vie de bohème. Il fréquente les milieux artistiques de Montmartre au début du XXe siècle, notamment le Bateau-Lavoir, et croise la route d’artistes comme Picasso ou Apollinaire.

Il prend le pseudonyme Pierre Mac Orlan, qu’il adopte définitivement dès ses premiers textes publiés.

La guerre et la désillusion

Mobilisé pendant la Première Guerre mondiale, il est blessé en 1916 et réformé. Cet épisode l’éloigne du pacifisme romantique et marque profondément son œuvre, nourrie par une vision désenchantée de l’aventure et de la condition humaine.

Il invente le concept de « fantastique social », une manière de raconter la réalité à travers le prisme du mystère, de l’étrangeté, sans tomber dans le surnaturel.

Une œuvre prolifique et variée

Mac Orlan a écrit dans une grande variété de genres :

  • Romans : Le Quai des Brumes (1927), qui inspira le célèbre film de Marcel Carné ;
  • Essais et récits d'aventures : Légionnaires (1930), La Bandera (1931) ;
  • Chansons : il est l’auteur des paroles du célèbre « Le Chant de la Légion » (1936) et de chansons pour Marguerite Deval, Fréhel, ou encore Mistinguett ;
  • Chroniques journalistiques : pour Le Quotidien, Paris-Soir ou encore Le Crapouillot.

Son style se caractérise par une langue limpide, parfois gouailleuse, toujours empreinte de poésie rugueuse et de mélancolie.

Distinctions

  • Grand prix de littérature de l’Académie française (1950)
  • Commandeur de la Légion d’honneur

Un homme fasciné par les ports, la mer et les marges

Mac Orlan est resté célèbre pour son goût des ports (Hambourg, Anvers, Brest...), des aventuriers, des prostituées, des clochards, et des soldats perdus. Il a magnifié ces figures de la marge dans une œuvre empreinte de fraternité, de tendresse et de lucidité.

Bonne lecture !